Réduire les émissions pour s’adapter aux changements climatiques et à la surveillance accrue du gouvernement

Auteur(s) S. Albert-Green et G. Rainsford

Les répercussions des changements climatiques et des polluants provenant de l’atmosphère étant désormais mieux connues, les gouvernements resserrent sans cesse leur réglementation sur les émissions. Ce contexte réglementaire fluctuant pose un défi particulier pour les installations industrielles dont les infrastructures sont vieillissantes, car elles cherchent non seulement à survivre, mais à innover pour s’y adapter tout en diminuant l’ampleur des arrêts et des mises à niveau. En tant que gardiens de vastes connaissances dans ce domaine, comment pouvons-nous d’une part aider nos clients à s’adapter et à croître et d’autre part aspirer à créer un monde meilleur et plus vert?

Pour traiter efficacement les diverses émissions, il faut comprendre leur formation et leurs effets.

Trois polluants courants résultant de la combustion sont particulièrement néfastes pour l’environnement : les hydrocarbures imbrûlés, les matières particulaires et les oxydes d’azote (NOx). 

 Composition des gaz d’échappement typiques des chaudières alimentées au gaz naturel

Figure 1 : Composition des gaz d’échappement typiques des chaudières alimentées au gaz naturel

Les hydrocarbures imbrûlés, principalement sous forme de méthane, sont libérés lors d’une combustion incomplète. Ils contribuent environ 30 fois plus au réchauffement planétaire que le dioxyde de carbone (CO2). S’il est bien entretenu, l’équipement fixe de combustion (les centrales électriques, les chaudières industrielles, les turbines à gaz, etc.) n’émet généralement pas de quantités importantes de méthane.

Les matières particulaires, surtout la suie et la cendre, attirent davantage l’attention en raison de leurs effets sur la santé et de leur visibilité, mais elles contribuent aussi de façon importante au réchauffement planétaire.  La cendre est un élément incombustible contenu dans les matières combustibles, tandis que la suie est un agrégat de particules très fines qui se forment lors de réactions organiques en phase gazeuse.  Ces résidus émanent essentiellement de combustibles solides et liquides, y compris ceux utilisés dans les moteurs diesel et à essence.  D’importantes quantités se déposent sur les calottes glaciaires aux pôles : les dépôts noirs absorbent la chaleur du soleil et accélèrent ainsi la fonte des glaciers. 

Les oxydes d’azote (NOx) sont naturellement formés à partir de l’air pendant la combustion. Ils constituent toutefois une grande part du smog et ont jusqu’à 300 fois plus d’incidence sur le réchauffement planétaire que le CO2. Les NOx proviennent principalement de l’azote présent dans l’air (une réaction thermique se produit dans les zones à haute température adjacentes à une flamme) et de l’azote présent dans les combustibles, en particulier les combustibles solides. 

Étant donné que la grande majorité des procédés de combustion et des combustibles produisent des NOx, ces polluants sont les plus réglementés et l’ensemble des émetteurs subissent une pression croissante pour en réduire les émissions.

Cet article traite de trois techniques courantes de réduction des NOx. Il existe cependant de nombreuses autres solutions, notamment des technologies novatrices qui font leur entrée sur le marché. Il est important de noter qu’il n’existe pas de « solution universelle », car chaque installation doit composer avec ses propres défis et contraintes.

Une étude adaptée à l’emplacement est donc nécessaire pour sélectionner la technique optimale de réduction des NOx. Le profil d’exploitation, l’équipement, le produit final, la conformité réglementaire, la durée de vie restante, la disponibilité des services publics et l’efficience de l’usine influent sur le choix de la technique. Or, le choix de la bonne technique peut offrir d’importants avantages économiques à long terme.

Vue transversale des systèmes de combustion les plus courants : une chaudière à tubes d’eau et une turbine à gaz industrielle

Source : Oland, C. B., Oak Ridge National Laboratory, « Guide to low-emission boiler and combustion equipment selection », ORNL/TM-2002/19, 2002, https://compressortech2.com/siemens-secure-fpso-compression-train-order/
Figure 2 : Vue transversale des systèmes de combustion électrique les plus courants : une chaudière à tubes d’eau et une turbine à gaz industrielle

1. Brûleurs à faible émission d’oxyde d’azote

Au cours des dernières décennies, les chaudières et les turbines à gaz ont été équipées de série de brûleurs à faible émission de NOx compatibles avec n’importe quel combustible.  Ces brûleurs contrôlent avec précision la dynamique et la chimie de la combustion, ainsi que la forme de la flamme afin de réduire les NOx qui se forment dans les zones à haute température près de la flamme et dans le combustible.  Une stratégie de commande répandue consiste à étager l’injection du combustible ou de l’air de façon à agrandir la flamme, à réduire l’intensité de combustion et à abaisser les températures.  L’étagement du combustible peut également créer des poches de combustion riche en combustible (excédent), ce qui est particulièrement efficace pour contrôler les NOx émis par l’azote présent dans le combustible. De plus, un contrôle précis de la combustion permet à certains brûleurs à faible émission de NOx d’utiliser moins d’air excédentaire, ce qui améliore l’efficacité globale.

Brûleurs au gaz naturel à faible émission de NOx pour les systèmes de chaudière, de deux grands fabricants

Source : https://www.johnzinkhamworthy.com/products-applications/burners/  et https://www.zeeco.com/burners/burners-process-glsf-fj-combo.php
Figure 3 : Brûleurs au gaz naturel à faible émission de NOx pour les systèmes de chaudière, par deux grands fabricants

Ces brûleurs réduisent la formation de NOx d’environ 60 % (comparativement à une combustion non contrôlée) et d’au plus 90 % lorsqu’ils sont combinés à la recirculation des gaz de combustion (RGC) dans les chaudières. Lorsqu’ils brûlent du gaz naturel, ils suffisent généralement à assurer la conformité aux règlements de nombreux pays puisqu’ils permettent de respecter facilement le seuil de 50 ppm ou moins. Dans les applications de conception spéciale, une concentration de NOx inférieure à 10 ppm est possible. 
Il peut être nécessaire de modifier une chaudière pour y installer des brûleurs à faible émission de NOx, mais il s’agit souvent d’une option très économique et rapide à mettre en œuvre. De plus, les brûleurs ont généralement un impact négligeable sur les autres émissions et sur l’efficacité.

2. Recirculation des gaz de combustion

La RGC est une autre technique de réduction des NOx largement utilisée dans les chaudières. Elle réintroduit environ 10 à 20 % des gaz de combustion (en masse) de la cheminée dans la chambre de combustion. Elle est efficace avec la plupart des combustibles et des techniques de combustion. La recirculation réduit les températures de combustion en agissant comme un dissipateur de chaleur et en déplaçant l’oxygène du front de flamme pour forcer la flamme à se dilater. La formation de NOx, qui est liée de façon exponentielle à la température, diminue alors parce que les concentrations d’oxygène réactif sont réduites.

Configurations de RGC pour les systèmes de chaudière (induite à gauche et forcée à droite)

Source : Bell, R. D. et Buckingham, F. P., « An overview of technologies for reduction of oxides of nitrogen from combustion devices ».

Figure 4 : Configurations de RGC pour les systèmes de chaudière (induite à gauche et forcée à droite)

La RGC est souvent employée conjointement avec d’autres mécanismes de contrôle, comme les brûleurs à faible émission de NOx. À eux seuls, les systèmes de RGC peuvent réduire les NOx de plus de 50 % (comparativement à une combustion non contrôlée); ils obtiennent de meilleurs résultats lorsqu’ils sont combinés aux brûleurs à faible émission de NOx. La RGC entraîne une légère hausse du monoxyde de carbone et des émissions d’hydrocarbures imbrûlés. Elle diminue aussi l’efficacité des chaudières, souvent de moins de 1 %.  L’un des avantages est que l’on peut augmenter la recirculation pour réduire davantage les NOx en cas de nouvelles limites réglementaires. Cependant, l’efficacité diminuera proportionnellement.

La recirculation des gaz de combustion peut être induite ou forcée.  Dans le premier cas, le gaz de combustion est aspiré dans la boîte à vent par le ventilateur de soufflage de la chaudière. Dans le deuxième cas, un ventilateur plus petit et séparé injecte ou disperse le gaz de combustion à haute température dans la boîte à vent. Dans un cas comme dans l’autre, le gaz de combustion et l’air frais doivent bien se mélanger avant d’entrer dans les brûleurs. Lors d’une mise à niveau, la configuration forcée peut s’avérer plus rentable si le ventilateur de soufflage est en mesure de supporter la contre-pression accrue provenant de la boîte à vent. Toutefois, la configuration induite est préférable du point de vue de l’entretien, du mélange des gaz et de l’appel de courant total : les nouveaux projets devraient donc privilégier cette dernière.

L’installation d’un système de RGC peut avoir plusieurs répercussions sur une chaudière. La température de la vapeur et des tubes aura tendance à augmenter, ce qui pourrait compromettre l’intégrité des anciens systèmes et nuire à la stabilité de la flamme des brûleurs existants, surtout si les gaz de combustion et l’air frais ne sont pas bien mélangés avant d’y pénétrer. Par conséquent, il faut étudier avec soin la chaudière pour déterminer si elle peut recevoir un système de RGC.

3. Réduction catalytique sélective

La réduction catalytique sélective (RCS) est une technique de contrôle des NOx post-combustion qui convient à tout combustible et système de combustion. De l’urée ou de l’ammoniac est injecté dans les gaz de combustion, avant le catalyseur, pour former de l’eau et de l’azote en aval.

Schéma d’un système de RCS utilisé pour une chaudière

Source : https://www.power-technology.com/projects/nacogdocheswoodfired/attachment/nacogdocheswoodfired3/
Figure 5 : Schéma d’un système de RCS utilisé pour une chaudière

La RCS est très efficace et peut réduire les émissions de NOx de plus de 95 %. Toutefois, les coûts d’investissement sont prohibitifs; en effet, ils peuvent dépasser ceux des brûleurs à faible émission de NOx et de la RGC d’un ordre de grandeur. Les coûts d’exploitation sont également élevés, car à l’achat des agents réactifs s’ajoute le remplacement du catalyseur tous les trois à cinq ans. De même, la charge parasite du système sera plus élevée en raison de la perte de charge dans le catalyseur et du fonctionnement de la grille d’injection de l’ammoniac ou de l’urée. Enfin, l’utilisation de réactifs gazeux moins coûteux, comme l’ammoniac, exige des mesures de sécurité supplémentaires et une surveillance adéquate, car ces composés sont très toxiques. 

Le principal avantage de la RCS, outre son efficacité à réduire les NOx, est son absence d’effet négatif sur d’autres émissions de combustion et sur l’efficacité de la chaudière lorsque l’éventuelle perte de charge supplémentaire est compensée. La RCS est couramment utilisée dans les centrales au charbon parce qu’elle réduit efficacement les niveaux élevés de NOx et qu’elle peut supporter les charges élevées de particules. Elle n’est généralement pas nécessaire pour les combustibles plus propres comme le gaz naturel.

Conclusions

Cette publication se veut un guide technique préliminaire. Elle présente les techniques de réduction courantes, ainsi que leurs avantages et leurs inconvénients. Toutefois, comme il existe de nombreuses autres options et que les techniques émergentes se multiplient, il est important de procéder à des évaluations sur mesure afin de cerner la meilleure technique pour le projet. De nombreux facteurs influent sur le choix de la technique et doivent être dûment pris en compte, notamment le type de combustible, les équipements de production d’énergie, les tendances et réglementations futures en matière d’émissions, les coûts d’investissement et d’exploitation et, enfin, les exigences d’entretien.  Avec une expertise adéquate, la mise en conformité aux règlements sur les NOx est presque toujours atteinte à la satisfaction du client.

Veuillez noter que cet article se veut un guide général. Les réductions citées sont celles d’installations types et sont tirées de sources publiques.  Chaque site étant unique, les résultats ne sont pas nécessairement représentatifs.